Pierre Royer était mon grand-père, mais ne cherchez pas son acte de naissance sous ce prénom. Pour l’état-civil il s’appelait Daniel, mais il a été baptisé Pierre à l’église. Un petit problème de compréhension entre ses parents. La légende familiale voulait que pour qu’un soldat ne soit pas envoyé au front pendant la première guerre mondiale il fallait un certains nombre d’enfants « vivants » à la maison. Pauline, sa mère, serait donc allé dans les tranchés où se trouvait son mari pour avoir un enfant en plus et qu’il rentre à la maison. Je ne sais si c’est vrai mais mon grand-père était de décembre 1918, il faut que je vois si mon arrière-grand-père a eu une permission vers février/mars.
Il fût très tôt orphelin, de mère à 10 ans et de père à 15. Il commença par suivre les traces de son père et devint tailleur de pierre.
J’ai eu la chance de pouvoir discuter avec lui avant qu’il nous quitte. Soldat pendant la seconde guerre mondiale il fut rapidement fait prisonnier. Après être passé par le Stalag XIII A près de Nuremberg, il fût envoyé en tant qu’Arbeitskommando dans une ferme en Tchécoslovaquie. Toujours prisonnier, il devait officiellement être de la main d’œuvre gratuite pour une famille de collaborateurs nazis. Cependant cette famille était dans la résistance et avec mon grand-père ils ont fait évader des prisonniers. Mon grand-père a traversé plusieurs fois l’Europe en guerre pour emmener ces évadés d’un point A à un point B. Il est même allé jusqu’à l’embouchure du Danube. On pourrait me dire que ce sont les souvenirs d’un vieil homme, il avait plus de 80 ans quand il me l’a raconté, mais j’ai des preuves. En effet, après la guerre il a reçu plusieurs courriers de cette famille tchécoslovaque qui devait prouver que leur collaboration avec les nazis n’était qu’une couverture.
A côté de l’Oflag XIII, sur le même terrain, se trouvait le Stalag XIII A, camp de soldats et sous-officiers prisonniers. A la mi-août 1940 déjà 80.000 prisonniers belges y furent internés et peu après séparés, les 50.000 Flamands pouvant rentrer chez eux tandis que les Wallons restèrent détenus. A cause du nombre grandissant de prisonniers les autorités divisèrent le camp en 3 camps, les Stalags XIII A, B et C, à partir de 1943 il existe aussi un Stalag XIII D. La plupart des prisonniers du Stalag furent très vite intégrés sous forme de commandos de travail (Arbeitskommandos) dans l’économie allemand e qui pouvait ainsi remplacer les travailleurs mobilisés, et détenus dans des camps d’entreprises, souvent des écoles ou des auberges qui offraient rarement un hébergement humain et une protection suffisante contre les attaques aériennes. Les prisonniers français furent présents dans tous les domaines de l’économie allemande, que ce soit agriculture, industrie ou même dans les services municipaux. Ainsi à Nuremberg, un document des Archives municipales concernant l’hébergement des prisonniers constate déjà dès le 7 août 1940 la présence de 300 prisonniers français à l’usine MAN. Selon une statistique du 28 août 1940, 1172 prisonniers (890 Français, 184 Belges, 100 Polonais) travaillent déjà dans l’industrie d’armement p. ex.à l’entreprise Faun (65) et chez Siemens- Schuckert (264) et également dans l’agriculture (46) ou à la brasserie Tucher (20). Les chiffres livrés par une statistique du 28 octobre 1941,donc avant l’arrivée en masse des prisonniers soviétiques déjà sont impressionnants. Source : « Les prisonniers de guerre français à Nuremberg 1940-1945 » de Danièle List Site : http://www.rijo.homepage.t-online.de/pdf/FR_NU_WK2_pg.pdf |
Il rentra à la maison en 1945 soit cinq ans après être parti et cinq ans après avoir épousé ma grand-mère. Ils ont été mariés trois mois avant qu’il ne soit mobilisé. Ils durent reprendre leur vie où elle s’était arrêtée. Ils achetèrent du terrain, devinrent horticulteurs et eurent six enfants.
Bel hommage !
passionnant et émouvant ! Quel bel échange de correspondances !