Pour lire le début et l'année 1914
J’ai eu la chance de récupérer ces informations grâce à ma grand-mère. Mme Deny avait 11 ans en 1914. Elle a rédigé ce témoignage il y a plusieurs années. C Mes souvenirs du début de la g…
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Arrive le certificat d’études, fin mai 1915, dans le groupe scolaire Courlancy évènement considérable dans la vie d’un enfant. A l’oral, les filles font de la couture, les garçons du dessin. Mon voisin compose un tableau où des soldats se battent furieusement : Français perçant des allemands à la baïonnette. La guerre nous marquait tous profondément. Un mois après c’est la distribution des prix qui a lieu dans le hall des caves Champion, Place Saint-Nicaise. Un général préside le jury, je reçois le diplôme du certificat avec un prix qui est « Les voyages d’une hirondelle » et un certificat du général « qu’après X jours de bombardement la jeune élève L.D. a été reçue au certificat d’études ».
Nous sommes tous très fiers de cette attestation, plus peut-être que de tout le reste. Mais pour moi, ces 3 pièces seront détruites dans l’incendie de la ferme de mes grands parents à Vrigny, en 1918. Le retour des caves Champion est assuré, comme à l’aller, par un camion conduit par un soldat, un bombardement commence, le camion file à toute vitesse, le conducteur ne veut pas s’arrêter quand nous arrivons au bas de ma rue. Nous débarquons donc au groupe Martin-Peller et je dois revenir à pied, en rasant les murs. Les obus éclatent un peu partout. Devant la porte de la Malterie, des officiers me font entrer dans le couloir, ils regardent mon prix et me félicitent, ils ne voulaient pas me laisser partir tant il y a danger. Je me sauve quand même sachant ma mère inquiète et je la trouve en effet venant au devant de moi. Nous rentrons indemnes à la maison.
Au début du mois d’août, ma sœur est avisée que son mari va bénéficier d’une permission de 6 jours, ce sont les premières que les poilus du front vont avoir depuis le début de la guerre. Mais par une bizarrerie du règlement, les permissionnaires ne peuvent la passer dans la zone des combats. Heureusement les beaux parents de ma sœur ont des parents à Saint Mard-les-Rouffy qui s’offrent à nous recevoir tous. J’y vais avec toute la famille, 8 personnes, mais la permission est retardée, je reviens à Reims avec mon père et ma mère, sans avoir vu mon beau-frère. Ma sœur, ses filles et ses beaux parents restent à Saint Mard jusqu’à l’arrivée tant attendue du permissionnaire, après cette rencontre, personne ne le reverra…. jamais plus !
En septembre, notre école organise des vacances de repos pour les élèves. Je fais partie du groupe et nous partons passer un mois à Chateauneuf-en-Thimerais, dans l’Eure et Loir, en bordure d’une magnifique forêt et en lisière des champs de la Beauce. Repos bienvenu, qui nous remet de nos frayeurs journalières de la vie à Reims.
Durant ces vacances j’avais écrit une lettre à mon beau-frère, sans avoir de réponse. Celles écrites par ma sœur le sont également. Il est porté disparu à la date du 12 octobre, suite à l’offensive de Champagne du 25 septembre 1915, la première grande bataille engagée depuis la guerre de tranchées, qui nous vaudra de lourdes pertes sans aucun résultat.
A la rentrée d’octobre, les institutrices du groupe Martin-Peller, organisent une sorte de cours complémentaire pour les élèves ayant obtenu le certificat d’études, je le suivrai environ un an, mais avec des périodes d’absences pour travailler dans les vignes quand l’occasion s’en présentera.
superbe histoire j’adore