F comme filature Harmel

Certains de mes ancêtres ont travaillé pour la famille Harmel et un oncle par alliance en est un descendant direct.

Jacques-Joseph Harmel (1795-1894)

Jacques-Joseph Harmel fait construire à Warmeriville une filature de laine cardée et peignée en 1841. La filature est détruite par un incendie en 1874, elle est reconstruite dés l’année suivante. Le sort s’acharne et elle est de nouveau détruite pendant la Grande Guerre. Elle sera reconstruite dans les années 20. A chaque destruction, la famille en profite pour reconstruire une usine plus moderne.

La famille Harmel possède et exploite cette usine de père en fils jusqu’au dépôt de bilan de la société en 1977.

Léon Harmel (1829 – 1915)

Ayant hérité de son père la filature du Val-des-Bois, Léon Harmel entreprend de faire de son usine une sorte de communauté chrétienne où les ouvriers dirigent eux-mêmes un ensemble d’oeuvres sociales : mutuelle scolaire, enseignement ménager, cité ouvrière… Il institue, en 1883, la participation des travailleurs à la direction et au maintien de la discipline dans l’entreprise. De plus une caisse de famille, gérée par une commission ouvrière, est chargée d’attribuer des subventions en argent ou en nature. Il fût surnommé le « Bon père Léon »

Plus marquée par une sorte de « familialisme » que par le paternalisme (même si on l’a surnommé le Bon Père), l’action de Léon Harmel s’inspire du catholicisme social, notamment de l’Œuvre des Cercles de La Tour du Pin et d’Albert de Mun. Condamnant le libéralisme économique qui laisse l’ouvrier sans protection face au capital, Harmel et les membres des Cercles veulent d’abord apporter la sécurité morale et matérielle aux travailleurs au sein de « corporations » chrétiennes, sociétés religieuses et économiques formées librement par les patrons et les ouvriers.

Peu apprécié du patronat chrétien, Harmel se distingue peu à peu d’une partie des catholiques sociaux, lorsqu’il affirme la responsabilité de l’Etat dans l’ordre de la justice sociale, puis la nécessaire autonomie de l’organisation ouvrière face au patronat (il est parmi les initiateurs du premier congrès ouvrier chrétien en 1893); sa rupture avec de Mun intervient en 1892.

Insistant sur la validité de l’action politique et non plus seulement sociale, Harmel, s’appuyant sur l’encyclique Rerum novarum du pape Léon XIII, dont il est très apprécié, prône le ralliement des catholiques à la République et se trouve à la tête du mouvement démocrate chrétien: au Val-des-Bois se tiennent, à partir de 1888, des sessions d’étude réunissant les démocrates chrétiens du nord de la France.

De la nostalgie de la cité chrétienne qui s’exprime dans son Manuel d’une corporation chrétienne, publié en 1879, à l’action des catholiques sur le plan politique, l’itinéraire de Léon Harmel est significatif de l’évolution qui se fait jour au tournant du siècle parmi les catholiques français et qui aboutira à l’acceptation de l’état de fait républicain.

Après le bon père

Avant la Première Guerre Mondiale, l’usine emploie 52 hommes, 33 femmes et 60 enfants en 1849 et 550 ouvriers. Malgré les destructions intervenues lors de la guerre, l’entreprise pu continuer son activité après celle-ci.

La filature Harmel a survécu aux années 1920-1950 sans trop de casse contrairement à beaucoup de ses concurrents rémois qui ont disparus.

Dans les années 50 le client principal de la filature dépose le bilan et lui laisse une dette de plusieurs millions de francs. A cause de l’effet « boule de neige » l’entreprise Harmel est mise en redressement en 1954, mais elle continue de résister. En 1961, elle est la seule société à répondre favorable à Rhône-Poulenc pour tester une de leur invention, le Rhovyl. C’est ainsi que naquit « Harmelaine » constitué de Rhovyl et de laine.

En 1973, avec les accords du GATT les frontières s’ouvrent aux productions des pays à faible coût de main d’œuvre. La société ne supportera pas et dépose le bilan en 1977. L’activité se poursuivra jusqu’en 1979.

Anciennes cartes postales représentant les filatures Harmel à Warmeriville (51) - Léon Harmel
Anciennes cartes postales représentant les filatures Harmel à Warmeriville (51) - Léon Harmel
Anciennes cartes postales représentant les filatures Harmel à Warmeriville (51) - Léon Harmel

Anciennes cartes postales représentant les filatures Harmel à Warmeriville (51) – Léon Harmel

7 commentaires sur “F comme filature Harmel

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  1. Merci Céline pour cette découverte ! Mes beaux-parents habitent à La Tour du Pin, j’ai donc fait une petite recherche sur François René de La Tour du Pin 😉 On en apprend tous les jours, c’est un régal ^_^ Sophie

  2. Vraiment très intéressant.C’est malheureusement le sort de bien des usines, et je pense notamment aux usines de bonneterie troyenne… Leur sort est semblable à ce qui est décrit ici, hélas.

  3. J’ai trouvé votre page très intéressante. Léon HARMEL (Le Bon Père) était mon arrière-arrière grand-père… 🙂

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